vendredi 9 décembre 2011

A quoi ressemble Addis Abeba ?



Addis est une ville composite : ville et campagne cohabitent, les animaux de la ferme côtoient une circulation parfois intense, de belles maisons sont plantées au milieu des bidonvilles, de pauvres hères dorment la nuit devant les bijouteries du quartier Piazza, les immeubles neufs sortent de terre comme des champignons, bardés d'échafaudages de misère, en branches mal taillées.


 C'est une ville visiblement en expansion : il y a des chantiers partout. Ces constructions sont plus ou moins soignées. Il faudrait me payer cher pour monter sur un de ces échafaudages irréguliers en bois branlant. Parfois, devant les briques de béton sont mal assemblées, on voit pendre des briques au bout de fils de fer comme une guirlande de Noël, bref, ces chantiers offrent à l'œil des images insolites et peu rassurantes.


Il n'y a pas de quartiers uniformément riches ni de quartiers carrément pauvres. Cette ville est un exemple de mixité sociale. A un point frappant : sortir de l'ambassade et tomber directement dans le bidonville est une expérience à laquelle on ne s'habitue pas.


Addis est une ville d'altitude. Elle culmine à 2700 mètres. Nous sommes sur les hauts plateaux de l'Ethiopie. Ce qui fait que le climat est plutôt frais. En ce moment il fait en 5 et 8° le matin. On supporte l'anorak. La maison, non chauffée, est encore à 15 ° à midi mais il peut faire  de 20 à 25 ° dehors, sous un soleil fidèle tous ces mois-ci. Le soir, vers 18h, redescente de température, grelottage dans les maisons, chaussettes, pulls, feux dans les cheminées et coucher précoce pour se réchauffer.


Addis vue de la colline de N''Toto


Sur N'Toto, on est à 2900 mètres. En se levant tôt, on peut espérer faire quelques foulées d'entraînement avec Haile Guebre Selassié, le champion de course éthiopien.



Le parc de l'ambassade de France
L'ambassade est située en hauteur, les maisons sont cernées par de hauts eucalyptus, il fait donc encore quelques degrés de moins qu'au centre-ville.



Des bidonvilles
Il est faux paraît-il, au sens géographique, de parler de bidonvilles car ces maisons en pisé avec des toits de tôle ondulée sont  répertoriées. Elles semblent avoir l'électricité, parfois l'eau. Il n'en reste pas moins que l'on voit beaucoup de gens se laver les cheveux devant les maisons à l'aide d'un seau, comme dans les bons vieux westerns.






Le route appartient à tous


Echoppe de bric et de broc...


aux belles couleurs néanmoins
La tendance actuelle est à la destruction de ces quartiers bidonvilles pour faire place à des immeubles neufs. Les habitants seraient autoritairement déplacés vers des quartiers nouveaux, éloignés du centre et ils seraient  relogés dans des immeubles avec eau et électricité. C'est bien joli mais toute la vie sociale, toutes les échoppes, les mini-commerces exercés par ces habitants disparaissent du même coup. La grand-mère qui sèche des bouses de vaches pour allumer les feux, celui qui taille des troncs, celui qui récupère du carton pour isoler les murs, celui qui fait des meubles dehors devant sa maison .... Toute cette micro-économie est à terre, sans parler de la difficulté de circuler dans une ville où les transports publics sont très peu développés.


Les trottoirs sont rares

samedi 12 novembre 2011

Faune et flore

Merci à mes amis du Muséum national d'Histoire naturelle de m'avoir aidée à compléter les légendes.



Oiseau du paradis Strelitzia

Kniphofia uvaria


Papyrus du nil

Liliacée......

Poissons du lac Tana

Pélican du lac Tana

Caféier

Manguier

Marabout du Nil

Tef (céréale dont on fait l'injara, crêpe qui constitue la nourriture de base)

Vache

jeudi 10 novembre 2011

Guebre Mariam : mon lycée










L'alliance de la pierre et du vert
Situé au cœur d'Addis, le lycée franco-éthiopien Guebre Mariam accueille 1700 élèves.  Il est homologué de la petite section de maternelle à la terminale (filières ES, L et S) par le ministère français de l’Éducation nationale et est conventionné par l’AEFE. C’est l’établissement mutualisateur pour les 10 lycées français de la zone Afrique orientale.










Ce lycée bénéficie d'une réputation de qualité, il est même le lycée d'excellence d'Addis Abeba. Il est aussi infiniment moins cher que les lycées anglais et américains (nous sommes 17 fois moins cher que le lycée américain). Le choix est donc vite fait. Quand vous dites Guebre-Mariam, c'est comme si vous disiez Henri IV à Paris. Nous y accueillons donc l'élite intellectuelle, politique, administrative de la capitale. 





60 % des élèves sont éthiopiens et suivent ici un cursus français, doublé d'un programme en sciences et lettres en amharique. 
Les coursives géométriques
Les autres élèves viennent d'Afrique de l'Ouest, souvent des enfants de diplomates ou fonctionnaires internationaux car Addis est le siège de l'OUA. 
L'Afrique à l'honneur
Enfin, il y a 10 % de français.  Ceux-ci se trouvent à fréquenter leurs camarades éthiopiens hyper-motivés, travailleurs, sérieux. Un choc positif pour nos enfants. En effet, ici, un bac français, c'est l'assurance d'un bon travail. L'anglais étant très poussé, on en sort trilingue. 
Des lignes
Salle de classe plutôt agréable
Comme enseignante, je suis ravie par ces élèves, par leur intelligence, leur éducation, leur gentillesse. Il y a bien sûr des notions rencontrées au fil des textes qui leur semblent absurdes : la laïcité, l'athéisme, le concubinage... Dans ce pays traditionnel et ultra croyant, ces notions n'ont pas cours. Or dans nos textes, à commencer par les fabliaux du moyen-âge, en passant par Molière, pour arriver à Voltaire, le doute s'installe.


mercredi 9 novembre 2011

L'orphelinat

Je ne pensais pas faire partie un jour des équipes bénévoles de mère Teresa, mais voilà, c'est fait. Les bébés m'ont prise, j'y pense sans arrêt et c'est devenu en quelques semaines une part très importante de ma vie. Elie est venu lui aussi. Ça n'a rien de désagréable de prendre dans les bras ces bébés qui posent leur tête sur votre épaule, avides de tendresse, prenant ce qui est bon à prendre. Et puis, leur parler, leur expliquer des choses, prendre du temps rien que pour eux. En voyant ces petits pyjamas troués, j'ai pensé avec nostalgie à tous ceux que j'ai donnés avant de partir pour libérer à Pontigny de la place pour mes autres affaires. Cet été, j'aimerais récupérer des habits d'enfants, jouets, tout ce qui ne sert plus. Si vous en avez, gardez-les moi. Comme dit la sœur, ici tout sert : habits (enfants adultes), draps, couvertures mais je ne pourrai pas prendre des tonnes en avion. Je me limiterai aux petites affaires.

mercredi 2 novembre 2011

Se soigner en Ethiopie

Il y a 3000 médecins pour 85 millions d'Ethiopiens. Les chiffres parlent d'eux-mêmes.
Quand on tombe malade,  on serre les dents. Quand ça devient vraiment inquiétant, on part pour l'hôpital public qui vous couche dans un lit, vous fait, dans le meilleur des cas, le bon diagnostic et vous prescrit des médicaments ... à acheter vous-même. 
C'est arrivé hier au jeune frère de notre chauffeur. Prix à payer pour des antibiotiques contre une infection gastrique: 1200 ETB, soit environ 50 euros, soit plus de la moitié d'un bon salaire mensuel. Panique familiale car personne n'a d'argent de côté avec l'inflation terrible qui sévit depuis deux ans, panique d'autant plus qu'une jeune sœur de 18 ans est morte il y a deux ans d'un empoisonnement, sans que les médecins de l'hôpital n'essaient de la sauver.
Tout s'est bien terminé cette fois mais la précarité de leurs vies nous atterre. La mortalité infantile est très élevée, l'espérance de vie à la naissance n'excède pas 56 ans.

mardi 1 novembre 2011

Visite à l'orphelinat Missionaries of Charity, ordre créé par mère Teresa

Ce matin, mardi 1er novembre, nous sommes allés passer quelques temps auprès des enfants d'un orphelinat proche de l'ambassade. Il est dirigé par une sœur française, sœur Jeanne d'Arc. Elle dirige également l'hôpital en face de la rue, elle gère ainsi plus de 1000 personnes. Jeune femme au regard transparent, au corps solide, très attentive à chacun des enfants.  La mort des mamans qui arrivent à elle en fin de vie pour confier leur petit, c'est son pain quotidien. Elle en parle sans pathos. On nous a orientés vers la salle des petits de six à douze mois. Tous avides de câlins, tendant les bras pour une balade à hauteur d'adulte.
L'orphelinat est propre, gai, y circulent de nombreuses employées, jeunes, affectueuses, et des visiteurs à l'infini : simple passants espagnols, américains, suédois..., jeunes volontaires qui viennent travailler tous les jours et enfin, bénévoles occasionnels comme nous étions ce matin, quatre Français pour parler aux bébés, les câliner, leur donner le biberon et leur chanter des comptines de chez-nous :" les petites marionnettes" et "tourne petit moulin". Evidemment, il y a la salle des enfants handicapés qui vous serre le cœur. Ceux-là n'auront pas de famille.
Les bébés de notre salle ouvrent de grands yeux ronds, touchent nos cheveux, barbe, boutons de gilet. Ils passent d'un bras à l'autre, habitués sans doute à une multitude de soignants. Ils sont promis pour la plupart à l'adoption, sauf deux d'entre eux dont la mère est morte mais dont le père vit dans la rue. On espère que ceux-là retrouveront leur papa. Pour les autres, beaucoup d'abandons pour cause de pauvreté ou de décès par le sida.
Soudain, un couple d'Espagnols arrive dans la salle, accompagnés de leur fils adoptif d'environ sept ans. Ils viennent faire connaissance  d'un petit avec lequel nous venons de  jouer et qui sera leur fils dans deux jours. Première rencontre. Nous sommes de trop. Enorme pudeur des parents qui prennent le petit dans les bras avec une sorte de détachement. Le père ne le regarde pas encore. Pas de débordement. Aucune asphyxie sentimentale. Le petit est à l'aise, rigolard, comme il a été depuis ce matin. Le grand frère prend des photos et ils s'éloignent tous les quatre pour faire connaissance plus tranquillement. Le grand lui aussi a été adopté ici.
Il y a cinq millions d'orphelins en Ethiopie.


dimanche 30 octobre 2011

Vacances de Toussaint au Lac Tana



Jeudi 20 octobre 2011, nous quittons Addis à bord de la Land Rover, direction Bahir Dar via Debre Markos. La route est longue, mais correcte, du point de vue de l'asphalte. En revanche, elle est encombrée de vaches, d'ânes, de poules, de marcheurs, et cela, tout au long des 650 km que nous accomplirons, les yeux tendus vers d'éventuels enfants, animaux ou crevasses dans la route qui mettraient en péril des vies précieuses. 


Nous traversons le long de cette seule route vers le Nord, des dizaines de villages, composés de maisons en torchis, nous voyons d'ailleurs de nombreuses maisons en construction, à tous les stades de finition, ce qui nous permet de comprendre comment l'on fait son logis : une structure en branches de bois irrégulières mais qu'importe..., le remplissage à la main avec de la paille mêlée à de la boue, puis un crépi plus propre, si l'on veut, en terre, lissé à la main, ce qui lui donne au soleil une merveilleuse finition, douce et humaine. Les fenêtres sont creusées et fermées avec des volets en tôle, tout comme le toit. Devant ces maisons, des plantes décoratives, des jardinets, des bas-côtés proprets, nettoyés par les chèvres, moutons, vaches, chevaux et ânes qui semblent vivre sur et par les bords de route.






De ces villages se dégage une impression angélique de calme, de simplicité et de bonheur.  On croise des enfants à n'en plus finir, il en sort de partout. La plupart sont habillés aux couleurs de leur école et portent leurs livres scolaires serrés par une méchante ficelle. Les habits sont usés mais assortis et tout ce petit monde aux mêmes couleurs donne un sentiment d'organisation, de sérieux. Un enfant me montre sur la couverture de son livre de sciences : Einstein, on se comprend. D'autres enfants ne vont pas à l'école, ils travaillent déjà comme petits bergers et bergères. Chacun deux ou trois bêtes : une vache, un cheval et deux chèvres, qui paissent. Quand nous passons en voiture, ils crient sans exception : "Farang" ce qui signifie "étranger", et si on s'arrête, ils demandent "money " au cas où...
Descente sur le Nil, majestueuse vallée profonde pour un petit filet de Nil bleu finalement. Puis remontée pénible pour la Land Rover.
Nous arrivons à Debre Markos. Petite ville au milieu de nulle part mais grand centre urbain pour ces nombreux villages. Pas de beauté mais un petit charme par son côté vivant. Le petit futé, seul guide francophone sur l'Ethiopie recommande le Paradise Hotel. Nous visitons une chambre, accablés par la fatigue, déçus et en même temps amusés par ce taudis vanté par le guide. Mais nous trouverons mieux avec le FM Hotel, prétentieux mais assez propre. Coupures de courant et d'eau habituelles mais assez bon restaurant.



Et ça repart le lendemain. Mêmes scènes pastorales, araires à bœufs, petits bergers sifflant dans des roseaux, hommes droits  jambes nues, buste entouré par une étole, bâton de berger sur les épaules tenu par leurs deux mains appuyées de chaque côté de la tête. Et les femmes, pliées en deux, qui portent des fardeaux écrasants de bois ramassé en forêt.


Nous arrivons enfin à notre destination : Bahir Dar, villégiature, cité lacustre élégamment allongée au bord du lac Tana. De beaux hôtels, des logdes accueillants, des allées d'arbres, un air de ville et de vacances. Il fait plus chaud qu'à Addis. Nous cherchons pendant une heure l'hôtel Tana qui n'est pas indiqué. Nous le trouvons finalement, nous ne saurons jamais pourquoi il est si discret. Hôtel d'état, il a un vieux charme des années soixante-dix, la décoration a vieilli, de même que les équipements, le personnel est tout juste aimable mais la terrasse ombragée au bord du lac est magique.

Nous avons un guide, Daniel, jeune homme cultivé, anglophone, gentil, prévenant et attaché à nous fabriquer de beaux souvenirs.

Nous partons pour les monastères en bateau. Ceux-ci ont été construits sur des îles du lac, loin de tout.  Cette solitude invite d'emblée à la méditation. Certains monastères sont interdits aux femmes.


Il faut trois heures de croisière pour parvenir au plus fascinant : soixante hommes en prière, une vie réduite au plus simple argument : prier, manger, dormir, et  recevoir ces rares et étranges visiteurs pour leur expliquer patiemment la vie monastique et recevoir d'eux quelques sous pour subsister. 





Les peintures murales du XVIIe siècle laissent sans souffle. Je ne comprends pas pourquoi les personnages ont comme des bourrelets au cou. Je pose la question à mes amis historiens de l'art qui se reconnaîtront.



Sur le lac, nous avons croisé des pêcheurs en barque de papyrus, cherchant bois et poissons.





Le lendemain, nous allons voir les chutes du Nil. Après une balade d'une heure sous le soleil, nous traversons un vieux pont construit par les Portugais au XVIIe siècle, et enfin accédons à ce spectacle somptueux des chutes. Nous allons au plus près recevoir quelques embruns. Silence et contemplation. 





Des enfants eux, se lavent, se baignent, s'amusent dans ce fleuve, sans se complaire dans  des mythes comme nous.





















Puis, à l’embouchure du Nil, nous apercevons des hippopotames. 
Au retour, nous dormons à l'Hôtel Tilik de Debre Markos, très soigné mais dont  le restaurant n'est pas terrible. La règle du voyageur au restaurant est la suivante : pas de crudités, pas de glaçons, pas de glace, pas d'œufs mal cuits, des plats simples sans laitage. Frites, beefsteaks, riz, sont en principe sans danger.